Dominique Tantin, chercheur et écrivain
Dominique Tantin nait le 7 septembre 1950 à Stains, commune de Seine Saint-Denis, d’un père maçon et d’une mère couturière, d’origine limousine tous les deux.Et la région d’Ambazac, proche d’Oradour, c’est une terre de maquis, où courent les récits de la légende de Guingouin, ce qui ne sera pas sans conséquence quelques décennies plus tard. Surtout si l’on ajoute l’omniprésence de la mémoire des FTP dans sa commune natale, communiste depuis 1936.
Au lycée Paul Éluard de Saint-Denis, Dominique Tantin rencontre quelques professeurs marquants, notamment Jean Marcenac en philo, ex capitaine FTP du Lot, actif au PCF, ami d’Éluard, Aragon, Lurçat… poète à ses heures. Charismatique. Mais aussi d’excellents professeurs d’histoire ….
Littéraire, le jeune Dominique est passionné par l’histoire (et la géographie) : la fac d’histoire est logiquement l’étape suivante. Le Quartier latin, des cours souvent passionnants par des sommités des sciences historiques : Maitron, Ellenstein, Pedroncini, Perroy, Toubert, Poperen, et, les dominant tous par sa personnalité, Albert Soboul. Moments de plénitude …
Et l’enseignement par voie de conséquence.
Suivant sa jeune épouse sur les marges bretonnes, Dominique devient maitre auxiliaire au collège de Chemillé, au coeur des Mauges catholiques et royales : rude dépaysement pour un gars de la banlieue rouge ! Mais les archives de Loire-Atlantique sont une mine et peu après, en 1973, il passe sa maitrise dirigée par Albert Soboul avec un mémoire consacré à La vente des biens nationaux de première origine dans le district de Chäteaubriant. En 1975, il est certifié et nommé en Deux-Sèvres, au lycée Desfontaines de Melle. Mais il doit ouvrir le dictionnaire pour en apprendre davantage sur cette « charmante capitale du baudet du Poitou ». Dominique enseigne à Melle de 1976 à 1986 en prenant vraiment goût à l’enseignement. « J’aimais les élèves, dit-il, et je crois que le plus souvent ils me le rendaient bien. J’étais devenu enseignant par amour de l’Histoire et j’y ajoutai un motif supplémentaire de persévérer dans cette voie. »Muté au lycée Jean Macé de Niort, il regrette l’ambiance familiale, détendue, sans prétention de Desfontaines. Les choses étaient simples, les conflits rares ; des amitiés solides s’y nouèrent. Néanmoins, à Jean Macé, il rencontre Michel Chaumet qui l’initie à l’informatique et avec lequel il partage un intérêt pour la seconde guerre mondiale.
La cinquantaine venue, Dominique enchaine l’agrégation, un DEA puis une thèse d’histoire contemporaine sous la direction d’Henry Rousso, alors directeur de l’IHTP. Deux ans plus tard, retraité, Dominique Tantin commence une nouvelle vie, celle d’historien. Son intérêt pour la seconde guerre mondiale s’était cristallisé progressivement, depuis les années 80. Ces années furent marquées par un renouvellement de l’historiographie (Paxton dès 1973, Rousso, Azéma…) sur Vichy et ce que l’on a appelé la Shoah après le film monumental de Claude Lanzmann. En 2000, il suit la première université d’été consacrée à la Shoah. Il invite Ida Grinspan, rescapée d’Auschwitz-Birkenau, à venir témoigner dans son lycée, Et il fait la connaissance de Jean-Marie Pouplain avec lequel Michel Chaumet avait publié la première Histoire de la Résistance en Deux-Sèvres. En 2005, l’occasion se présente d’emmener les élèves de Terminale visiter le camp d’Auschwitz.Voyage en avion de 24h Poitiers-Cracovie, car jusqu’à Auschwitz, visite et rencontre de témoins ; journée épuisante, douloureuse, bouleversante, mais quel impact sur les élèves !
De 2009 à 2012, Dominique organise plusieurs voyages d’une dizaine de jours en Pologne sur les traces de la Shoah et à la découverte d’un pays et de ses habitants. De ces voyages il reste beaucoup d’images et un film autour de l’histoire d’Ida Grinspan tourné en France et à Birkenau à l’initiative de Michel Chaumet qui nous accompagna en 2011. Le film est diffusé par Canopé (ex CNDP) dans les établissements scolaires.
Une version condensée de sa thèse parait en 2014 : La justice des années sombres en Deux-Sèvres 1940-1944. Mais dès 2005, en lien avec celle-ci, avait paru son premier ouvrage consacré à un magistrat résistant, déporté, puis membre de la délégation française à Nuremberg, Delphin Debenest, un magistrat en guerre contre le nazisme. S’appuyant sur des archives exceptionnellement riches, il tirait ainsi de l’oubli un des rares magistrats qui aient eu le courage de dire non à l’occupant et à ses collaborateurs. Par la suite, dans le prolongement de ses voyages en Pologne et des travaux pionniers de Jean-Marie Pouplain sur les persécutions antisémites en Deux-Sèvres, Dominique Tantin publie en 2013 une étude consacré aux Juifs des Deux-Sèvres dans la Shoah 1940-1945.
Enfin, en 2013 il fait la connaissance de Claude Pennetier, historien successeur de Jean Maitron à la tête du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, qui l’invite à le rejoindre pour la rédaction d’un Dictionnaire des fusillés 1940-1944, réunissant 4300 biographies. En complément, un site Internet rassemble plus de 12 000 biographies et plusieurs centaines de monographies de lieux d’exécutions et de massacre (pour les Deux-Sèvres, le Chizon de Sainte-Pezenne et Cerizay- Montravers) et une association « Pour un Maitron des Fusillés et Exécutés » (PMFE) a été fondée en 2015 pour organiser cette recherche : son président se nomme … Dominique Tantin.
Publications :
Dictionnaire biographique des fusillés (1940-1944) [co-auteur]
2015 Éditions de l’Atelier
sous la direction de Jean-Pierre Besse, Claude Pennetier, Thomas Pouty et Delphine Leneveu, Paris.
Site web : http://maitron-fusilles-40-44.univ-paris1.fr/
La justice des années sombres en Deux-Sèvres, 1940-1945
2014 Geste éditions
Les Juifs des Deux-Sèvres dans la Shoah, 1940-1945
2013 Geste éditions
Delphin Debenest, un magistrat en guerre contre le nazisme, 1939-1945
2005 Geste éditions