Edmond Proust : l’homme

Edmond Proust est né à Chenay le 20 octobre 1894 dans une famille protestante du Mellois. Son enfance est marquée par la mort précoce de son père, qui aura peu contribué à sa formation.

Le terroir où il est né va, en partie, marquer son destin et explique certains des traits qui le caractérise, notamment l’attachement aux siens et à sa terre ainsi que son ardeur militante. Mais sa personnalité est également marquée par ses qualités propres.

Edmond Proust, le surdoué

C’est un bel homme que décrit ainsi l’un de ses camarades de promotion : « C’est un beau jeune homme, de taille au-dessus de la moyenne, d’allure dégagée, dont le visage au teint mat, éclairé par deux yeux vifs au regard clair et droit, est encadré d’abondants et longs cheveux d’un noir de jais… »

Edmond Proust est un grand sportif qui devient champion cycliste départemental à 18 ans en 1912, qui joue aussi dans l’équipe de rugby de l’E.N. puis se lance dans l’athlétisme.

Il manifeste une grande intelligence et un grand rayonnement : « Doué d’une claire intelligence alliée à une exquise sensibilité, animé d’une énergie morale peu commune au service d’un sens élevé du devoir, il exerce, sans le vouloir, une influence … sur tous ses camarades… Tous, nous subissons inconsciemment dans doute, l’ascendant du chef qu’il révèle déjà en lui… » dit de lui Emile Eugène. Et l’un de ses proches, Hubert Arnault, d’indiquer : « Ce qui me frappa dès la première rencontre, c’est la force sereine qui se dégageait de toute sa personne, le regard clair et tranquille, et le timbre si particulier de sa voix, rauque et rude dès l‘abord, mais où perçait la bonté. »

Doté d’un esprit méthodique et précis, il manifeste une curiosité et une capacité intellectuelle hors du commun, au service de laquelle il met une volonté de fer : « Il était de ceux qui ne se laissent jamais abattre jamais. Je n’ai connu de lui qu’efforts opiniâtres et luttes incessantes. C’est la même volonté qui lui permit de reprendre la lutte après son arrestation manquée par la Gestapo, de repousser les honneurs auxquels il aurait pu prétendre à la Libération, de sacrifier son temps et sa santé pour la prospérité de la Mutuelle » précise encore Hubert Arnault.

Edmond Proust, le militant

Edmond Proust est un homme profondément marqué par son milieu familial et professionnel.
Issu d’une terre protestante dont la culture (Edmond Proust n’est ni croyant ni pratiquant) se caractérise par l’importance du libre arbitre, le progressisme social et l’esprit de résistance.
Il est également influencé par sa formation à l’école normale de Parthenay (promotion 1912 -1915), foyer de diffusion d’idées progressistes.
Proust est donc fermement laïc et républicain. Ses convictions politiques le poussent à flirter un temps avec le parti communiste, mais il est trop indépendant pour être encarté dans un parti et il compte des amis dans tous les partis de gauche. Et, comme de nombreux défenseurs de la laïcité, Edmond Proust est franc-maçon.

Il est de tous les combats contre les ennemis traditionnels de la démocratie et du progrès que représentent alors l’église catholique et le patronat. Naturellement, il n’hésite pas à défendre l’école, fer de lance de la république et du progrès social, lorsqu’elle paraît menacée par ces forces : Son école était inattaquable. « Malheur à qui aurait osé lui porter le premier coup ! » dit Yves Sainton qui l’a bien connu.
Il prend naturellement sa place dans le combat antifasciste dès le début des années 30 au moment où la démocratie est partout menacée en Europe et anime localement le comité Amsterdam-Pleyel proche du PCF et animé par des intellectuels comme Barbusse, Camus ou Langevin.

Plus encore, c’est un militant syndicaliste et associatif. Aussi, comme la grande majorité des instituteurs issus de l’école normale, adhère-t-il au SNI, avec lequel il aura des relations à la fois amicales et orageuses au moment de la création de la MAAIF.

Il a été profondément marqué par la Grande Guerre puisque en 1914, il a vingt ans et qu’il se trouve mobilisé dès le mois de décembre de cette année et qu’il ne sera démobilisé qu’en septembre 1919. Blessé en juin 1915, il se bat aussi bien en Argonne qu’en Champagne, sans oublier l’enfer de Verdun : son courage et sa bravoure lui ont valu la croix de guerre avec palme.

Comme des millions d’autres, il a vécu cette tragédie morale ce qui l’amène à militer après- guerre dans les associations républicaines d’anciens combattants et devient même vice-président national de la F.N.C.R. (Fédération nationale des combattants républicains). De la guerre, il garde un profond dégoût mais il saura surmonter son penchant pacifiste pour s’engager dans la lutte contre le nazisme.

Edmond Proust, le fidèle

L’attachement d’Edmond Proust à sa terre natale est avéré par de nombreux faits, telle la fidélité à la commune de Saivres, où il a effectué toute sa carrière dans ses deux écoles : celle du bourg (de 1919 à 1922) et celle de Perré (de 1922 à 1944) ou encore son retour dans sa modeste école alors qu’il est auréolé de la gloire de la Résistance et de la victoire. Son ami Lacroix le rappelle : « Votre devoir achevé, simplement vous êtes rentrés dans le rang et, sans éclat, sans ostentation, vous avez voulu revenir parmi nous qui vous aimions tant et qui étions si fiers de vous ».

Edmond Proust est également fortement impliqué dans la vie sociale de sa commune, surtout dans les années 20 et 30, notamment dans la SÉP (Société d’Éducation Populaire) de Saivres qu’il a fondée, expression même de la foi en la vertu progressiste de l’éducation par la culture et le sport. Mais il assure aussi le secrétariat de mairie, anime la société de tir et trouve encore le temps d’aller à bicyclette donner à domicile des leçons de piano. « Je sais, c’est trop » avoue-t-il.

Quant à son attachement à sa famille, il est attesté par tous les témoins qui notent son regard ébloui de bonheur lorsqu’il tient sa petite-fille dans ses bras.
De son mariage avec Lina Chasport en 1916 est né son fils Robert qui a joué un rôle important après de lui en le secondant tant dans la Résistance que dans le développement de la MAAIF, cette mutuelle à laquelle il est tant attaché mais dont une mort précoce le prive le 27 novembre 1956.

Pour de plus amples informations, on peut se reporter à ma biographie d’Edmond Proust parue en 2016 chez Geste éditions
Michel Chaumet